Il aura fallu le temps mais, enfin, on s’attelle à cette petite pépite qu’est Ark Nova. Distingué d’un Diamant d’Or en 2022, qui récompense les jeux Experts, le titre de Super Meeple vous invite à développer un zoo. Le twist, c’est qu’il vous faudra investir sur deux plans bien distincts pour espérer décrocher la victoire. On vous en dit plus dans un instant !
Terraforming Park
A sa sortie, Ark Nova a souvent été comparé à Terraforming Mars, et pour cause ! Difficile de ne pas voir les similitudes avec son aîné. La mécanique principale repose en effet sur du combo de cartes, portée par une iconographie omniprésente mais très efficace.
Concrètement, chacune des 255 cartes peut interagir avec les autres. Certains animaux vous demanderont par exemple d’avoir des congénères dans votre parc ou d’avoir conclu un accord avec une équipe de recherche spécifique pour être joués. Les mécènes, eux, feront fructifier vos points ou vos finances sous certaines conditions. Il est donc essentiel de mettre rapidement sur pieds une stratégie de développement pertinente… avec ce que le jeu vous donne. Et c’est là que les choses se compliquent.
Si l’interaction entre les joueurs est relativement limitée, il y a un point sur lequel vous allez batailler : l’ajout de nouvelles cartes à votre main, et donc à votre zoo. Tout au long de la partie, six cartes sont présentées face visible dans une rivière et disponibles pour l’ensemble des joueurs. Au terme de chaque manche, les deux cartes les plus à gauche sont défaussées et remplacées. Un certain sentiment d’urgence s’installe donc lorsqu’une carte aux propriétés convoitées apparaît : il faudra la récupérer avant qu’elle ne quitte le jeu ou soit empochée par l’un de vos adversaires.
A votre tour, cinq actions sont disponibles :
- “Construction”, pour poser un nouveau bâtiment / enclos
- “Animaux”, pour accueillir un ou plusieurs animaux dans votre parc
- “Mécènes”, pour jouer une carte Mécène ou gagner de l’argent
- “Association”, pour mener un projet de conservation, conclure un partenariat scientifique…
- “Cartes”, pour… piocher de nouvelles cartes
Ces actions, sous forme de cartes elles-aussi, sont placées face à vous de gauche à droite. Plus la carte est à droite, plus l’action sera puissante. Par exemple, vous pourrez construire un enclos de trois cases maximum si votre carte Construction est en 3è position et de cinq en 5è position. De la même façon, vous pourrez piocher plus de cartes, placer plus d’animaux dans votre zoo…
Au cours de la partie, vous aurez l’occasion de passer jusqu’à quatre de ces cinq cartes au niveau 2 et augmenter encore vos possibilités.
Loue enclos T3 avec vue sur le yak
Comme vous vous en doutez, vos animaux ne se baladent pas librement dans votre parc. En plus des éventuelles conditions vous imposant d’héberger des espèces ou d’avoir signé des accords particuliers, vous devrez leur trouver une place. Chaque joueur dispose d’un plateau représentant le terrain sur lequel seront construits ses futurs enclos. Certains sont très petits, d’autres vastes : leur taille dépend de l’animal que vous accueillez. N’espérez pas mettre un lion dans un espace prévu pour un harfang des neiges !
Ces enclos prendront différentes formes géométriques et devront systématiquement être placés à côté d’un enclos existant. En progressant dans la partie, on sera donc de plus en plus contraint par notre terrain, sachant qu’il faudra également jongler avec les zones rocheuses et les plans d’eau. En plus des enclos classiques, d’autres constructions spéciales pourront également agrémenter votre zoo : kiosque, pavillon, bassin des tortues, entrée secondaire… Chacun de ces éléments vous octroiera différents bonus durant ou au terme de la partie. Petite précision à ne pas négliger : vous gagnerez des points supplémentaires si vous parvenez à recouvrir l’ensemble des cases de votre terrain.
Plutôt lièvre ou tortue ?
Ces points, d’ailleurs, parlons-en. Parce que c’est pas tout ça, mais on ne vous a toujours pas expliqué comment on gagnait une partie d’Ark Nova et je vous entends trépigner d’impatience.
On ne dirait pas comme ça, mais Ark Nova est une course. Oui, vous avez bien lu. Le plateau principal est constituée de deux pistes de score : l’attrait et la conservation. Pour résumer rapidement les choses, vous gagnez des points d’attrait en plaçant de nouveaux animaux dans votre zoo et des points de conservation en validant des objectifs. Ces derniers vous demanderont par exemple de relâcher un certain type d’animal dans la nature ou d’héberger plusieurs animaux d’un même continent.
Si on vous parle de course, c’est parce que ces deux pistes de score s’opposent. Chacune démarre d’un côté ou de l’autre du plateau et, lorsque les deux pions d’un même joueur se croisent, la partie est terminée. On passe ensuite au calcul des points en ajoutant les éventuels points de fin de partie puis en soustrayant le score de conservation de chaque joueur à son score d’attrait. Un objectif secret, distribué en fin de partie, vous aidera à booster votre score final. Vous l’aurez compris : si vous ne voulez pas vous retrouver avec un score négatif (ce qui m’est arrivé très souvent dans les premières parties), vous devrez veiller à progresser régulièrement sur les deux aspects du jeu. C’est d’autant plus important que la fin de partie arrive souvent très vite !
A deux, c’est mieux
Pour terminer, un mot sur le jeu à deux joueurs, qui fonctionne très bien. A vrai dire, j’aurais même tendance à le conseiller dans cette configuration ! Comme mentionné plus haut, Ark Nova est un jeu plutôt solitaire. Les interactions sont limitées et, le seul véritable moyen de mettre des bâtons dans les roues de votre adversaire, c’est de surveiller son jeu. En restant vigilant sur les cartes qu’il priorise et les projets de conservation qu’il mène, vous entreverrez ses objectifs et pourrez subtiliser les cartes qui l’intéressent. Cependant, vous vous en doutez : si cela est faisable à deux, ça l’est beaucoup moins à trois ou quatre ! A plus de joueurs, on risque donc surtout de faire sa popote personnelle dans son coin. De plus, cela risque de considérablement rallonger la partie, sachant qu’il faudra déjà compter deux bonnes heures à deux (avec l’installation).
L’avis de Eliwenn
J’adore Ark Nova. Et pourtant, ce n’était pas gagné. Lorsque le jeu a commencé à faire son petit buzz dans les communautés de joueurs, je suis restée de marbre. A vrai dire, la direction artistique me rebutait complètement, je trouvais le jeu assez laid. Les couleurs tirant sur le marron et le vert lui donnait un aspect vieillot et les photos sur les cartes ne me faisaient pas franchement rêver ! Et puis, suite aux nombreuses critiques dithyrambiques, j’ai fait l’effort d’aller outre et de creuser un peu. C’est de cette façon que je suis tombée dedans.Ce qui me plaît le plus ? La quantité énorme de cartes, qui fait qu’on ne sait jamais ce que le jeu va nous donner. J’aime cette idée de s’adapter en permanence avec ce que l’on a à disposition, quitte à revoir complètement sa stratégie quand les tirages ne nous sont pas favorables. Cette richesse lui confère une grande rejouabilité et on ne fera jamais deux fois la même partie ! C’est bien simple, deux ans plus tard, j’ai toujours le même plaisir à le ressortir (même si je perds la plupart du temps).
Ark Nova n’est cependant pas exempt de défauts. En premier, je l’ai abordé plus haut : son manque d’interactions entre les joueurs. Dans l’ensemble, chacun reste concentré sur son plateau, à établir son plan de jeu dans son coin, et il y a assez peu de choses qui vont l’en détourner. Certes, le jeu a essayé d’intégrer des sortes de cartes “d’attaque” lorsque l’on joue certains animaux. Par exemple, les serpents vous permettront d’infliger “Constriction” à votre adversaire, ce qui réduira la puissance de certaines de ses actions. Cependant, c’est très anecdotique et on ne pourra pas baser sa stratégie là-dessus !
Un autre petit regret également : le manque de diversité des cartes “Décompte final”, ces objectifs secrets distribués en début de partie. Il n’y a en a que onze et certaines ne sont clairement pas intéressantes à jouer. Sachant qu’on en reçoit deux au départ et que l’on ne doit en conserver qu’une, on se retrouve bien souvent à rejouer les mêmes. Vu la richesse du reste du matériel, on a l’impression que cet aspect a été un peu bâclé.
Néanmoins, Ark Nova est dans mon top 3 ! Les règles sont plutôt simples (tout est indiqué sur les cartes et le plateau), le jeu est très généreux en matériel et il bénéficie d’une importante rejouabilité. C’est un excellent jeu de gestion et de cartes, proposé à un tarif raisonnable. Si vous ne le connaissez pas encore, penchez-vous dessus !
L’avis de Foine
Ark Nova… Ah… Ark Nova… Le plus difficile, pour un gros jeu, c’est d’être profond mais accessible. Tactique mais pas répétitif. Complexe dans ses mécaniques, mais assez clair pour que l’on puisse facilement y revenir.Ark Nova coche toutes ces cases.
Ark Nova est simple. Vous n’avez que cinq actions possible à votre tour. Jamais plus, jamais moins. Les choix sont donc réduits et la prise de décision est aisée. Mais de chacune de ces décisions pourra découler moult conséquences, être le point de départ d’un grand pas dans l’évolution de votre zoo ou juste le point d’orgue qui vous fera gagner les points qui mettront fin à la partie.
Chaque partie de Ark Nova est unique. Le nombre de cartes présentes dans le jeu est tellement gargantuesque que vous ne saurez jamais sur quoi vous allez tomber. Vous devrez donc vous adapter à ce qu’il vous donne. Les plans des zoos eux-aussi permettent un peu de diversité mais dans les faits, même sans ça, toutes les parties sont différentes et imprévisibles. C’est très agréable. Alors oui, ça peut être frustrant car, parfois, le jeu ne vous laisse pas réaliser le plan optimal que vous aviez en tête. Mais devoir s’adapter se révèle très exaltant (surtout lorsque vous trouvez une solution !).
Autre aspect d’Ark Nova que j’adore : la course. Qui aurait pu prévoir qu’un jeu de gestion de zoo se révèle être aussi un jeu de course ? Comme dit plus haut, ce sont les joueurs qui enclenchent la fin de la partie. Donc, quand la fin du jeu arrive, si les joueurs sont au coude à coude, une sorte de duel de Far West s’enclenche. Qui tirera le premier ? Faut-il être gourmand et s’approcher le plus possible pour faire un maximum de point ou bien marquer juste ce qu’il faut pour mettre fin à la partie ? A l’inverse, si l’écart s’est creusé pendant la partie, le challenger va sentir la corde se serrer autour de son cou au fur et à mesure que le leader approche de la fin. Mais vu qu’en fin de partie, les points peuvent monter très vite, il n’est pas impossible que le challenger fasse une remontada des enfers pour faire vivre la fable du lièvre et la tortue à l’adversaire.
Toutefois, Ark Nova n’est pas parfait. Les visuels ne sont pas fous. Les plateaux ne sont pas très beaux non plus… Bref la DA est assez générique. Ce n’est pas moche, mais c’est très quelconque.
Par ailleurs, on a parfois du mal à comprendre le lien entre l’intitulé d’une carte et ses effets, mais bon… C’est un “défaut” vraiment annexe et minime. C’est plus pour avoir quelque chose à redire sur le jeu.
Pour finir, peut être que le thème du zoo pourrait vous refroidir. Là-dessus, c’est vraiment votre propre sensibilité qui sera l’arbitre. Néanmoins, Ark Nova à la bonne idée de faire en sorte que les points de conservation (quand vous réintroduisez des animaux dans la nature, que vous faites des programmes de reproduction, etc…) soient beaucoup plus importants sur l’échelle du score que les points d’attrait (qui correspondent aux entrées que fait votre zoo). Vous êtes donc incité à préserver les animaux plutôt qu’à les exploiter. Ça ne bouleverse pas la thématique, mais c’est agréable à noter.
En bref, Ark Nova fait parti de ces jeux que je peux ressortir à l’infini (si on a le temps de faire une partie !). Donc, pourquoi se retenir de se faire plaisir ?
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